Lundi 30 juin 2014
Ce matin, je teste la piscine avant de partir. C’est un lieu de relaxation incontournable en Islande, avec les sources chaudes naturelles. Parfait pour le cycliste que je suis.
Ici, comme pour toutes celles du pays, elle n’est quasiment pas ou très peu chlorée. L’explication est simple, en Islande, il est obligatoire dans les piscines de se laver entièrement nue avant d’entrer sur les bassins, et partout des affiches rappellent cette règle. Gare à celui qui ne respecte pas cela, car les islandais sont très à cheval sur l’hygiéne ! La loi prévoit même une amende ! Donc, dans les vestiaires (hommes et femmes de chaque côté, bien sûr !), c’est tout le monde à poil sous la douche…
A 10h00, après une heure de bain relaxant, je reprends donc la route, bien détendu et prêt à avaler des kilomètres. Aujourd’hui, le ciel est bleu, avec peu de nuages, enfin une belle journée! Je pars en tee-shirt car il fait 14°, température qui me semble bien chaude…
Dans un premier temps, au départ d’Egilsstaðir, je rejoins la route n°1 direction Myvatn. Elle s’étend vers le Nord, puis oblique vers l’ouest, dans une vallée longeant une rivière au milieu de prairies verdoyantes. Aussitôt bifurqué, un vent de Nord-Ouest se lève, et chaque rafale, reçue de ¾ face, me freine, voir me secoue brutalement. Je me retrouve parfois brusquement penché sur le côté!
Vers 14h30, j’arrive au pied d’une longue montée, qui semble quitter définitivement cette vallée. Malgré le dénivelé faible au départ, les rafales de vent m’obligent à descendre du vélo et à le pousser, durant la moitié de l’ascension, pendant plus d’une demi-heure. Alors que je m’arrête pour effectuer une pause et prendre quelques photos, une violente rafale expédie mon vélo sur le bas-côté, dans un petit fossé de 2 mètres de profondeur. Verdict : garde-boue fendue et béquille avant explosée… Je finis l’ascension tout en maugréant contre ce vent qui gâche une journée qui aurait pu être très agréable, car avec une température douce et des apparitions de soleil !
Sitôt passé cette longue montée, j’ai droit à un tout autre paysage. La route s’éloigne désormais de la vallée et oblique vers le Nord. Elle laisse place à un paysage totalement désertique. Je vais donc pédaler dans des hauts plateaux, à une altitude entre 400 et 500m. Les prairies font désormais place à de grandes étendues de sables brun et noir, parsemées de tapis de mousses, avec de temps à autres, quelques ilots de verdure.
Je bataille vent de face, par rafales violentes, sans protections naturelles, toute l’après-midi au milieu du désert. Une fois, après une longue courbe, et seulement durant quelques kilomètres, je suis propulsé à plus de 30km/h presque sans pédaler, puis un long virage me remet face au vent et je suis stoppé net à 6km/h !
Vers 20h, cela fait plusieurs kilomètres que je cherche en vain à repérer un endroit pour bivouaquer. Je suis en plein désert de sable noir et meuble, et aucun abri à l’horizon ! Je prends alors la décision de m’arrêter le plus tôt possible car le vent forci de plus en plus et je ne suis pas très fier sur la bicyclette.
Un panneau m’indique un parking à 500m, au milieu de nulle part. Le lieu n’est pas idyllique mais je n’ai rien de mieux en vue! les piquets « sols durs », que j’ai eu la bonne idée de prendre, me permette de planter la tente sur les pierres tassées du parking, au pied d’un petit cairn, sous des rafales de plus en plus violente… et la pluie qui commence à tomber…
Toute la nuit, la tempête secoue violemment la tente, dans un vacarme assourdissant, et je ne dors quasiment pas, car j’ai peur que la tente soit arrachée par les rafales. Par précautions, j’ai également couché le vélo sur le sol, calé avec 2 grosses pierres… On ne sait jamais!
J’ai pédalé pendant 100km en plein vent durant prés de 10h30 et très peu de pause. Le lendemain après-midi, à mon arrivée à Myvatn, le responsable du camping m’indiquera que la veille, la région à connu une tempête avec des rafales à plus de 100km/h… En fait, je pense que je l’ai traversé…
Mardi 01 juillet 2014
Je n’ai donc pas dormi de la nuit. J’ai même eu quelques frayeurs parfois, tant les rafales de vent étaient fortes. J’ai bien cru, à plusieurs reprises, que la toile allait s’arracher. Mais, elle est solide, finalement cette tente ! Pas le moindre début de déchirure !
A 8h30 du matin, bien content d’être toujours entier, je plie le campement, dans le vent, toujours présent mais moins violent. De toute façon, il n’y a pas la moindre vie dans le coin, et aucun abri. Je me dis qu’il vaut mieux avancer plutôt que d’attendre que cela se calme.
Durant les 75 km qui me séparent de Mývatn, le vent m’empêche de progresser au-delà de 7 à 8 km/h. Le paysage reste toujours aussi désertique. Je suis sur la route n°1, la principale du pays mais je ne croise ou ne me fait doubler que très rarement, pas plus de 4 ou 5 voitures par heure. J’ai vraiment ici, une sensation d’être seul au monde, sur une route sans fin. C’est assez étrange. Tout Le Long de la N°1, des cairns à distance régulières témoignent que l’homme n’a pas abandonné ces espaces pourtant totalement vierges. Mais que balisent-ils ? Mystère…
Peu à peu, je vois apparaitre devant moi une petite montagne ocre qui semble être sur ma route. Elle se rapproche tout doucement. Lorsque j’arrive en contrebas, j’ai parcouru plus de 25 km depuis que j’ai commencé à l’apercevoir. C’est un énorme massif de terre volcanique ocre qui se dresse au milieu de la route. Sur ma gauche, à son pied, des dizaines de fumerolles témoignent d’une activité volcanique. Un petit parking, où sont garés quelques voitures démontre l’intérêt touristique de ce lieu.
Je prends la décision de ne pas m’y arrêter. Il est 14h30 et je sais que Mývatn est derrière cette montagne. J’ai l’intention de ne pas repartir demain, et de profiter d’une journée de repos et de détente dans les eaux chaudes de ses bains naturels. Je reviendrai donc de ce côté de la montagne pour admirer ce lieu et prendre des photos des fumerolles.
Pour l’heure, j’entame la dernière grosse difficulté de la journée, une ascension de 10% sur un kilomètre. A première vue, cela parait peu difficile, mais je sais que je ne pourrais pas monter à vélo car sur le plat, le vent m’empêche déjà de progresser au-delà de 7 km/h , alors en montée…
A peine 150 m après le début de ce petit « mur », je suis stoppé net à 3km/h par une rafale de vent. Impossible de passer ce cap en pédalant. Je descends pour pousser la bicyclette à pied et c’est dans la souffrance que je termine cette ascension sur 700 ou 800 petit mètres… en 30mn !
En haut, la vue sur le lac de Mývatn est sublime. Après avoir repris mon souffle, je remonte sur la bécane bien décidé à profiter de la descente. C’était sans compter à nouveau sur le vent ! La descente se déroule à 12km/h, en pédalant !! C’est simple, si je ne pédale pas, je m’arrête ! C’est la première fois de ma vie que je me vois contraint de pédaler dans une descente à 10%… J’enrage sur le vélo et je maudis le vent !
J’arrive au camping vers 16h, épuisé par cette journée en plein vent, et une nuit précédente quasiment sans dormir. Après m’être installé, douché et avoir fait ma petite lessive, je pars en quête d’un bon repas, petite récompense bien méritée ! Ce sera une énorme pizza dans un petit restaurant au pied du lac. C’est bien repu que je rentre au camping vers 21h30…
Aujourd’hui, j’ai pédalé durant 9h, pour faire 75km, à 8km/h de moyenne seulement…
Mercredi 02 juillet 2014
Une journée de repos à Mývatn avec :
- Une courte matinée de promenade…
- Une longue aprés-midi de détente de plus de 4h au bain naturel de Mývatn, dans une eau bleu-turquoise à 38°C aux vertus thérapeutiques…
- Une température extérieure de 6°C (panneau d’affichage numérique dans la piscine) et de la pluie par averses…
- Des sorties de l’eau régulières (et rapides..brrr) du bain pour aller au sauna…
Ce fût sans doute l’un des plus agréables moments de ce tour d’Islande à vélo !
Jeudi 03 juillet 2014
Le temps est très couvert lorsque je quitte le camping au bord du lac, vers 11h. A peine sorti, je subi une crevaison de la roue arrière. C’est la première depuis mon départ. Au bord de la route, sous une petite bruine, je retourne le vélo et constate que le pneu a une déchirure de plusieurs cm sur le flanc.
Après le démontage de la roue, j’utilise le scotch renforcé que j’ai eu l’idée d’emporter avec moi. Deux couches de scotch à l’intérieur du pneu, sur la déchirure devraient faire l’affaire. Je répare la chambre à air et remonte l’ensemble. Cela semble tenir, malgré la pression forte à l’arrière, compte tenu du poids de l’ensemble avec les sacoches pleines.
Par précautions, je reviens néanmoins en arrière. Hier, j’ai en effet repéré un loueur de vélo à l’entrée de Myvatn. Bien gentiment il accepte de me vendre un pneu de rechange, un pneu VTT à crampons. Cela fera l’affaire si par malheur ma réparation ne tient pas, mieux vaut être prudent !
C’est donc à 12h30, avec un pneu VTT, plié et sanglé à l’arrière du vélo, et une réparation de fortune effectué sur mon schwalbe marathon, que je repars de Myvatn vers l’ouest, sur la route n°1.
Il me faut tout d’abord plus d’une heure pour contourner totalement le lac, puis le paysage laisse place à des prairies verdoyantes, de chaque côté de la route vallonnée. Vers 16h30, j’aperçois au loin une énorme cascade. C’est Goðafoss, l’une des plus célèbres d’Islande, avec ses 12m de hauteur et ses 30m de largeur.
Elle tient son nom, Goðafoss, littéralement « la chute des dieux », de l’adoption du christianisme en l’an 1000, lorsque de retour de l’Alping (Le parlement islandais, considéré comme le plus vieux parlement d’Europe), le diseur de loi Þorgeir Þorkelsson, s’y arrêta pour y jeter ses idoles issues de l’ancienne religion nordique. J’arrive donc dans un lieu historique de l’Islande.
Plus je m’approche, plus le bruit de la chute d’eau se fait présent. La route n°1 passe sur un pont, d’où, à quelques centaines de mètres, on aperçoit distinctement la chute d’eau. Le lieu me plait beaucoup. Il est déjà 17h, comme j’ai repéré qu’il y a un petit terrain de camping, attenant à un restaurant, je vais m’arrêter ici.
Après mon installation, je pars en randonnée le long d’un chemin qui m’emmène au pied de la cascade. Ici, le bruit de la chute est assourdissant, mais comme c’est beau ! La nature exprime ici, toute sa puissance ! De plus, je suis quasiment seul ici et je ne croise qu’un seul couple qui s’est arrêté pour prendre quelques photos… Il faut dire qu’il ne fait que 8°C sous une petite bruine constante…
Vendredi 4 juillet 2014
Toute la nuit, la pluie. Au matin, rien n’a changé. Sous la tente il ne fait que 4°. Nous sommes le 4 juillet.
J’ai mal dormi, la pluie sur la toile, avec le bruit de la cascade en fond et la température faible n’ont rien arrangé. Je décide donc de décaler mon départ pour la fin de matinée.
Vers 12h, je dois me rendre à l’évidence, le temps est très couvert, la petite pluie fine et froide ne cesse pas, il me faut partir. Je suis à moins de 60 Km d’Akureyri. Là-bas, j’ai bien l’intention de m’arrêter une journée complète pour visiter un peu la ville et profiter de ses infrastructures… et particulièrement de la piscine !
Je pars donc à 14h direction Akureyri, sous une pluie battante et froide et une température de 5°c, et bien sûr, contre le vent.
C’est un peu une constante depuis mon début de voyage, il y a maintenant une vingtaine de jours. Le vent est mon ennemi le plus forcené et je lutte, presque chaque jour, pour ne pas perdre cette bataille et abandonner. Dans un pays terne, sans intérêt, j’aurai renoncé depuis un moment. Mais ici tout est démesure et extraordinaire, les paysages, la météo, même les véhicules des islandais ! C’est ce qui m’attire et me donne envie de poursuivre… d’en voir plus et d’en savoir plus. Et je commence à l’aimer ce foutu pays !
Toute la journée, j’avance péniblement à 7 ou 8 km/h. J’ai sous les vêtements de pluie, deux polaires, je porte des gants d’hiver et un bonnet et j’ai parfois tout de même froid. Vers 18h30, après une succession de montées et de descentes à forts dénivelés, j’arrive sur le fjord Eyjafjörður. Au loin, en face, je commence à apercevoir Akureyri.
Le trafic de véhicule est de plus en plus intense sur la route n°1. Pas de doute, j’approche bien de la capitale du Nord. J’entame alors la descente du Fjord vers le sud, pour passer le pont qui me permettra d’entrer dans la ville.
Il est 20h lorsque j’arrive à Akureyri, et je me mets immédiatement à la recherche du camping, situé sur les hauteurs de la ville. Je suis impressionné par le nombre de camping-car, tous énorme, qui y séjournent. Ce sont des islandais, venus en très grand nombre y passer le week-end !
C’est aussi une particularité des Islandais, chaque week-end en été, ils voyagent avec leur camping-car ou leur 4X4 tractant des caravanes immenses, et viennent remplir les campings des villes. Au programme, piscines, shoppings, fêtes le soir…
Je cherche donc un petit coin éloigné au fond du camping pour planter ma tente, qui semble bien isolée au milieu des mastodontes mécaniques.
A 21h30, après une bonne douche et un merveilleux repas… soupe et pâtes lyophilisés… je me couche exténué. Demain , je visite la ville, et je vais me détendre à la piscine.
Sous la pluie, le vent et le froid, j’ai pédalé 56 km pendant plus du 7h…
samedi 5 juillet 2014
Ce matin, après une nuit correcte mais froide, le spectacle autour de moi, à la sortie de la tente, est assez spectaculaire. Dans les montagnes alentours, à quelques centaines de mètres d’altitude , il a neigé durant la nuit et les sommets sont entièrement recouverts.
Au petit déjeuner, j’apprends par un automobiliste que la piste qui descend vers le Landmannalaugar et traverse l’Islande du Nord vers le Sud vient d’être fermé pour au moins 4 ou 5 jours.
De fortes chutes de neige sous un blizzard violent empêchent tout départ vers les pistes centrales au départ d’Akureyri. Nous sommes pourtant bien le 05 Juillet!
C’était ma route, et pour tout dire, la plus grosse difficulté, mais celle que j’attendais aussi avec impatience ! Une semaine de traversé sans trace de vie humaine ( hormis les véhicules sur les pistes), des passages de gués nombreux… Je suis déçu…
Nous verrons cela demain, pour l’instant, je vais visiter Akureyri et cet après-midi, je vais tester la piscine avec ses bassins a 37, 38, 39 et 40 degrés, son sauna et son bassin de natation a 32°C… tout cela en plein air!!